Publié le 17 avril 2024

En résumé :

  • Commencez toujours par l’extérieur : vérifiez l’éclairage de la rue et des parties communes. Si tout est allumé, le problème vient de votre logement.
  • Le disjoncteur général est votre principal indicateur : s’il est sur « O » (Off) ou en position intermédiaire, la panne est interne (surcharge ou court-circuit).
  • Ne confondez pas une panne avec un dépassement de puissance (message « PUISS DEPASSEE » sur Linky) pour éviter un déplacement d’électricien inutile et coûteux.
  • En cas de panne générale confirmée, consultez l’outil en ligne « Info Coupure » d’Enedis avant d’appeler le service de dépannage.

Le noir complet. Plus un bruit, à part peut-être les enfants qui s’inquiètent ou le silence soudain du réfrigérateur. Dans ces moments, une seule question vous vient à l’esprit : « Est-ce que la panne est générale ou est-ce que ça vient de chez moi ? ». Le réflexe est souvent de se précipiter vers le tableau électrique pour actionner tous les boutons, ou de jeter un œil paniqué chez les voisins. Ces actions, bien que compréhensibles, manquent souvent de méthode et peuvent conduire à une mauvaise conclusion : appeler un électricien en urgence alors que le problème concerne tout le quartier, ou inversement, attendre indéfiniment un retour du courant qui ne viendra pas sans une action de votre part.

En tant que conseiller technique, je sais que le stress de la situation peut faire oublier les gestes simples. Pourtant, la clé n’est pas d’agir dans la précipitation, mais de suivre une séquence de diagnostic logique et très rapide. C’est ce que nous appelons le « diagnostic différentiel ». En moins de deux minutes, cette méthode permet de déterminer avec une quasi-certitude si vous devez contacter le service de dépannage d’Enedis ou si le problème relève de votre installation privée, nécessitant l’intervention d’un électricien. Adopter cette approche, c’est non seulement gagner un temps précieux, mais aussi s’éviter des frais de déplacement inutiles qui peuvent vite chiffrer.

Cet article va vous guider pas à pas, comme si vous m’aviez au téléphone. Nous allons suivre ensemble cette séquence de vérification, du plus simple au plus technique, pour poser un diagnostic fiable et prendre la bonne décision, en toute sérénité.

Pourquoi vos voisins ont-ils du courant alors que vous êtes dans le noir ?

Bonjour, restons calmes, nous allons régler ça ensemble. La toute première étape, avant même de toucher à votre installation, est de faire un diagnostic visuel depuis chez vous. Regardez par la fenêtre. C’est la question la plus simple mais la plus fondamentale : y a-t-il de la lumière dans la rue ou chez les voisins ? Si les lampadaires sont allumés et que vous voyez les fenêtres des immeubles d’en face éclairées, le diagnostic s’oriente à 99% vers une panne individuelle, c’est-à-dire localisée dans votre logement. Si vous habitez en appartement, une autre vérification simple consiste à regarder l’éclairage des parties communes. Si la lumière du couloir ou de l’escalier fonctionne, cela confirme que le problème est bien privatif.

Inversement, si tout votre quartier est plongé dans l’obscurité, il s’agit très certainement d’une panne de secteur. Dans ce cas, inutile de toucher à votre installation. Le meilleur réflexe est d’utiliser votre smartphone pour consulter l’outil en ligne « Info Coupure » d’Enedis. En renseignant votre adresse, vous saurez immédiatement si une panne est en cours de traitement sur le réseau et obtiendrez une heure estimée de rétablissement. Cela vous évite une attente téléphonique et vous donne une information fiable en temps réel. Cette simple distinction entre panne individuelle et panne de secteur est la base de tout le diagnostic.

Comment vérifier l’état du disjoncteur d’abonné avant d’appeler le dépannage ?

Très bien, il semble donc que la panne soit localisée chez vous. La deuxième étape de notre diagnostic nous amène devant votre installation électrique, et plus précisément devant le disjoncteur d’abonné (aussi appelé AGCP). C’est le boîtier principal, souvent placé à côté du compteur, qui protège toute votre installation. Avant toute manipulation, assurez-vous d’avoir les mains bien sèches. Maintenant, observez la position de sa manette. Il y a trois possibilités qui nous donnent des informations cruciales.

Ce schéma simple illustre les positions que vous pouvez observer. La position « I » (pour « On ») signifie que le courant devrait passer. La position « O » (pour « Off ») signifie qu’il est coupé. La troisième, et la plus révélatrice, est une position intermédiaire, entre I et O. C’est le signe qu’un défaut (surcharge ou court-circuit) a provoqué une coupure de sécurité.

Vue détaillée des différentes positions d'un disjoncteur d'abonné français avec mise en évidence de la position intermédiaire

Si la manette est sur « O » ou en position intermédiaire, vous pouvez tenter de la réarmer en la basculant fermement sur « I ». Si elle tient, le problème est résolu. Si elle saute immédiatement, ne forcez pas. Cela indique un défaut persistant. La sécurité de votre installation est assurée par des dispositifs très sensibles ; par exemple, les interrupteurs différentiels modernes détectent les fuites de courant dès 30mA de sensibilité pour vous protéger. Si le disjoncteur ne tient pas, nous passerons à l’étape d’identification du coupable.

Coupure de courant ou délestage : quelle différence et qui contacter ?

Parfois, une panne peut sembler générale alors qu’il s’agit d’une situation bien particulière : le délestage électrique. C’est une mesure préventive et contrôlée, décidée par RTE (le Réseau de Transport d’Électricité), pour éviter un black-out généralisé lorsque la demande en électricité dépasse la capacité de production nationale. Ces coupures sont volontaires, organisées et ciblées sur des zones géographiques tournantes. La grande différence avec une panne classique est leur caractère anticipé et leur durée limitée. En effet, selon les protocoles RTE, les coupures de délestage électrique durent 2 heures maximum par zone concernée.

Comment savoir si vous êtes concerné ? Le meilleur outil est l’application gouvernementale EcoWatt, souvent surnommée la « météo de l’électricité ». Développée avec RTE et Enedis, elle vous informe en temps réel de l’état de tension du réseau via un code couleur simple : vert (tout va bien), orange (système tendu, écogestes recommandés) et rouge (coupures inévitables si la consommation ne baisse pas). En cas de signal rouge, l’application vous prévient à l’avance si votre zone est susceptible d’être délestée. Dans ce cas, il n’y a rien d’autre à faire que de patienter. Contacter Enedis ou un électricien est inutile, car il ne s’agit pas d’une panne mais d’une mesure de gestion du réseau.

L’erreur qui fait exploser votre facture : confondre coupure et dépassement de puissance souscrite

C’est un scénario très courant : vous lancez le lave-linge en même temps que le four et les plaques de cuisson, et soudain, tout s’arrête. Votre premier réflexe est de penser à une panne. Pourtant, il s’agit le plus souvent d’un simple dépassement de puissance. Chaque contrat d’électricité inclut une « puissance souscrite » (par exemple 6 kVA, 9 kVA…). Si la somme de la puissance de vos appareils en fonctionnement dépasse ce seuil, le compteur Linky, pour protéger l’installation, se coupe automatiquement. L’erreur est de ne pas reconnaître ce cas de figure et d’appeler un électricien en urgence. Or, un tel appel n’est pas nécessaire et vous sera facturé : il faut savoir qu’un déplacement inutile d’un électricien est facturé entre 80€ et 150€, une somme considérable pour un problème que vous pouviez résoudre en 30 secondes.

Pour comprendre à quel point certains appareils sont gourmands en énergie, ce tableau donne un aperçu de leur impact sur un abonnement standard de 6 kVA (6000 Watts).

Puissance des appareils électroménagers courants
Appareil Puissance moyenne (Watts) Impact sur 6 kVA
Four électrique 2000-3000 W 33-50% de la puissance
Plaques à induction 3000-7000 W 50-116% de la puissance
Radiateur électrique 1000-2000 W 17-33% de la puissance
Lave-linge 2000-2500 W 33-42% de la puissance

Le compteur Linky vous aide à faire le diagnostic : son écran affichera le message « PUISS DEPASSEE ». La solution est simple : débranchez l’appareil le plus énergivore que vous venez d’allumer, puis appuyez pendant 2 à 3 secondes sur le bouton « + » de votre compteur pour le réarmer. Si ce phénomène se produit régulièrement, il est peut-être temps de contacter votre fournisseur d’énergie pour augmenter votre puissance souscrite.

Dans quel ordre vérifier : compteur, disjoncteur d’abonné, tableau principal ?

Maintenant que nous avons vu les différents cas de figure, il est temps de tout rassembler dans une séquence de diagnostic logique et ordonnée. Pour ne pas vous éparpiller et être certain de ne rien oublier, voici la méthode exacte à suivre, du plus général au plus précis. C’est l’ordre que suivrait un technicien pour identifier la source du problème de manière efficace. L’image ci-dessous vous montre la hiérarchie classique d’une installation domestique, allant du réseau public (via le compteur) à vos circuits privés (dans le tableau).

Vue large d'une installation électrique domestique montrant la hiérarchie entre compteur, disjoncteur d'abonné et tableau principal

Suivre cette hiérarchie est la clé. Ne commencez jamais par les fusibles de votre tableau sans avoir d’abord vérifié le disjoncteur général. Voici le plan d’action qui synthétise notre approche. C’est votre checklist pour résoudre 90% des pannes par vous-même.

Votre plan d’action pour un diagnostic fiable :

  1. Vérifier voisinage/parties communes : La première étape pour déterminer si la panne est générale ou privative. Si les autres ont du courant, le problème est chez vous.
  2. Contrôler le disjoncteur d’abonné : Observer sa position (I, O, ou intermédiaire). C’est l’indicateur principal d’un défaut interne.
  3. Consulter l’affichage du compteur Linky : Rechercher des messages clairs comme « PUISS DEPASSEE » qui vous donnent la cause directe de la coupure.
  4. Vérifier les interrupteurs différentiels 30mA sur le tableau : Si un seul est en position basse, cela isole la panne à une zone de votre logement (ex: les prises de la cuisine).
  5. Tester les disjoncteurs de circuit un par un : En dernier recours, si un différentiel a sauté, baissez tous ses disjoncteurs de circuit, réarmez-le, puis remontez les circuits un par un pour trouver le coupable.

Comment résoudre vous-même une panne électrique simple avant d’appeler le dépannage ?

Imaginons que vous ayez suivi la séquence : le disjoncteur général ou un interrupteur différentiel saute systématiquement dès que vous le réarmez. C’est le signe d’un court-circuit ou d’un appareil défectueux quelque part sur le circuit concerné. La mission est maintenant de jouer au détective pour trouver le « coupable ». Avec en moyenne près de 99 appareils électriques dans chaque foyer français, les suspects peuvent être nombreux, mais la méthode est simple.

La technique consiste à procéder par élimination. Commencez par débrancher TOUS les appareils électriques connectés aux prises du circuit qui pose problème. Cela inclut les multiprises, les chargeurs de téléphone, la cafetière, le grille-pain, la télévision, etc. Une fois que tout est débranché, retournez au tableau et tentez de réarmer le disjoncteur. S’il tient, félicitations, vous avez confirmé que le défaut provient bien d’un de vos appareils. La cause la plus fréquente est une simple multiprise défectueuse ou un appareil dont la résistance est usée. Maintenant, rebranchez vos appareils un par un. Celui qui fera sauter à nouveau le disjoncteur est le responsable. Il suffira de le mettre de côté et de ne plus l’utiliser avant de l’avoir fait réparer ou de l’avoir remplacé.

Comment obtenir l’attestation Consuel obligatoire pour votre installation électrique neuve ?

Ce sujet s’adresse plus particulièrement à ceux qui emménagent dans un logement neuf ou qui ont réalisé une rénovation électrique complète. Si c’est votre cas et que vous subissez une coupure, il est important de comprendre le rôle de l’attestation de conformité Consuel. Ce document est indispensable : il certifie que votre installation électrique respecte les normes de sécurité en vigueur. Sans lui, aucun fournisseur ne peut effectuer la première mise en service de votre compteur. Enedis l’exigera systématiquement avant d’ouvrir votre ligne. Pour un particulier, la démarche pour obtenir cette attestation a un coût et un délai à anticiper : il faut compter environ 125€ et un délai de traitement et de visite de contrôle pouvant aller jusqu’à 20 jours.

Il est crucial de savoir qu’il n’existe pas une, mais plusieurs attestations Consuel, identifiées par des couleurs différentes. Chacune correspond à un type d’installation spécifique. Ne pas demander la bonne attestation peut entraîner un refus de conformité et des retards. Voici un tableau pour vous y retrouver.

Les différentes couleurs du Consuel en France
Couleur Utilisation Type d’installation
Jaune Usage domestique traditionnel Habitation standard
Vert Production d’énergie Panneaux solaires
Bleu Production avec stockage Batteries domestiques
Violet Non connecté au réseau Site isolé

Si vous êtes dans une situation de première mise en service, assurez-vous que votre électricien a bien fait la demande de l’attestation appropriée. Tout retard ou absence de ce document est une cause fréquente de « panne » qui n’en est pas une, mais simplement une absence d’alimentation légale de votre logement.

Les points essentiels à retenir

  • Le premier réflexe : regarder dehors. L’éclairage public et celui des voisins vous indiquent immédiatement si la panne est privée ou générale.
  • Le disjoncteur général est votre meilleur informateur : sa position (On, Off ou intermédiaire) vous révèle si la coupure est due à un défaut de sécurité interne.
  • Ne pas confondre une panne (défaut) et un dépassement de puissance (trop d’appareils) est la clé pour éviter une facture de dépannage inutile.

Dépannage électrique urgent : comment trouver un professionnel fiable en moins de 30 minutes ?

Si, après toutes ces vérifications, le problème persiste – par exemple, le disjoncteur saute toujours malgré avoir débranché tous vos appareils – il est temps de faire appel à un électricien professionnel. Cependant, dans l’urgence, le risque de tomber sur une entreprise peu scrupuleuse est élevé. Les arnaques au dépannage à domicile sont malheureusement fréquentes, comme le confirment régulièrement les autorités.

Quasiment deux tiers des établissements de dépannage à domicile présentaient une anomalie : pratiques commerciales trompeuses, mauvaise information sur le prix, factures incomplètes.

– DGCCRF, Enquête 2023 de la répression des fraudes

Pour éviter les mauvaises surprises, il est impératif de garder son sang-froid et de suivre quelques règles de base pour choisir un artisan fiable. Ne vous fiez jamais au premier numéro trouvé sur un prospectus glissé dans votre boîte aux lettres, souvent sans aucune mention légale. Prenez quelques minutes pour vérifier l’existence de l’entreprise. Un devis, même sommaire et envoyé par SMS, doit être exigé avant toute intervention. C’est une protection légale. Enfin, un professionnel honnête ne vous facturera jamais un « forfait recherche de panne » exorbitant sans justification.

Checklist anti-arnaque pour un dépannage urgent

  • Méfiance envers les flyers sans numéro SIRET dans votre boîte aux lettres.
  • Exiger un devis écrit (même par SMS ou email) avant d’accepter le déplacement.
  • Vérifier l’existence et la réputation de l’entreprise sur des sites comme societe.com ou en consultant les avis en ligne.
  • Refuser tout « forfait recherche de panne » flou et non justifié par une première analyse téléphonique.
  • Savoir que pour toute intervention dont le montant dépasse 150 €, un devis détaillé est une obligation légale.

Si la panne est confirmée comme étant sur le réseau public ou si un danger est apparent (fils tombés à terre, odeur de brûlé au niveau du compteur), ne prenez aucun risque. L’étape suivante est de contacter directement le service de dépannage d’Enedis, disponible 24h/24 et 7j/7, au 09 72 67 50 XX (remplacez XX par le numéro de votre département).

Rédigé par Julien Moreau, Julien Moreau est électricien installateur certifié Qualifelec depuis 12 ans, spécialisé en rénovation d'installations électriques dans le bâti ancien et les maisons individuelles. Titulaire d'un CAP Électricien et d'un Brevet Professionnel installations et équipements électriques, il dirige aujourd'hui une entreprise artisanale de 4 compagnons intervenant en Île-de-France.